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Dans le cadre des fractures, la persistance de symptômes malgré une consolidation satisfaisante de l’os nécessite parfois d’envisager le retrait du matériel (1, 2). La présence d’un conflit mécanique entre le métal et les parties molles environnantes n’est que partiellement appréciée par la radiographie, compte tenu de superpositions osseuses (3, 4), du caractère statique de cette modalité, de son contraste insuffisant pour les parties molles et de son incapacité à corréler en temps réel la douleur et les structures visualisées. On comprend pourquoi l’échographie, cumulant ces diverses aptitudes en plus d’une excellente résolution spatiale, s’impose comme un outil moderne et incontournable dans l’analyse des phénomènes douloureux induits par ces matériels orthopédiques.
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L’examen doit débuter par un interrogatoire approfondi permettant de comprendre la chronologie des symptômes par rapport au geste opératoire, de détailler le mode de survenue des douleurs et de les localiser le plus précisément possible. L’analyse échographique commence par un examen statique s’attachant à identifier la totalité du matériel et à le situer dans son environnement, dans le plan transversal puis longitudinal. Chez le patient symptomatique, une pression de la sonde permet souvent de reproduire la douleur connue habituellement, tout en observant attentivement les structures immédiatement sous-jacentes. Cette corrélation temporelle entre l’image et le symptôme est un élément essentiel du diagnostic par l’échographie. Dans un second temps, l’étude sera dynamique, consistant à mobiliser passivement puis activement les structures en cause, afin d’objectiver un éventuel accrochage entre le métal et un tendon notamment.
L’étude in vivo mais également in vitro de pointes de vis métalliques démontre l’augmentation de ces artéfacts avec l’angle d’incidence de l’onde ultrasonore. En cas de doute, une saillie de vis sera donc mieux identifiée en inclinant la sonde pour l’aborder perpendiculairement. Le filetage des vis est en particulier plus facilement reconnaissable.
Leur proximité avec l’os au sein de gouttières de réflexion anatomiques rend les tendons particulièrement vulnérables au niveau du poignet et de la cheville notamment, par blessure au cours du geste opératoire ou par attrition secondaire lors de la mobilisation des tendons contre le matériel (5). La souffrance tendineuse au contact de ce dernier s’exprime d’abord par une hypervascularisation locale en Doppler couleur, à laquelle s’associe volontiers, sans être obligatoire, une ténosynovite liquidienne ou tissulaire prenant un aspect « en cible » dans le plan transversal et « en rail » dans le plan longitudinal (fig.2). La poursuite du conflit avec le matériel favorisera possiblement une rupture partielle, sous forme d’un clivage ou d’un amincissement transversal du tendon. Au stade ultime survient une rupture totale du tendon, avec vacuité du compartiment anatomique qui l’héberge et rétraction, parfois franche, des moignons tendineux proximal et distal (6). L’irritation des parties molles non tendineuses se traduira quant à elle par une bursite, au contact d’une bourse anatomique lorsqu’elle est présente, ou d’une « néobursite » liquidienne au sein d’un espace qui en est dénué.
Les particularités par articulations sont listées ci-dessous:
L’accrochage entre les pièces d’une prothèse et les tendons environnants est un risque bien connu des chirurgiens. Au genou, ceux-ci prennent garde à ne pas surdimensionner le matériel, au contact des tendons de la patte d’oie notamment.
A la hanche, la survenue d’une douleur en flexion au-dessus de 90° quelques mois après l’arthroplastie évoque en premier lieu un conflit entre une cupule acétabulaire débordante et la face profonde du tendon du psoas sus-jacent (18, 19). L’échographie permet d’objectiver un contact étroit entre le tendon et la saillie métallique et de confirmer, lors de manœuvre de flexion de la hanche, la localisation exacte des douleurs sous la sonde. Un épanchement de la bourse iliopsoas est rapporté jusque dans 50% des cas (19-21). Cet épanchement manque cependant de spécificité puisqu’il se rencontre également dans le cadre de l’infection (21) et du descellement acétabulaire (22). L’échographie permet à peu de frais, sans artéfact lié au métal et grâce à son bon contraste pour les parties molles d’objectiver le contact entre le tendon et le métal sous-jacent. Le diagnostic peut être confirmé par un test infiltratif (18), volontiers réalisé sous échographie. Ce geste est de réalisation aisée par voie latérale en respectant rigoureusement les règles d’asepsie cutanée dans ce contexte à risque. Enfin, la pénétration du muscle par une vis ou du ciment acétabulaire représentent deux diagnostics différentiels (19) que l’échographie permet de rechercher.
L’analyse de radiographies illustre le fait que les muscles sont en contact très étroit avec les plaques d’ostéosynthèse diaphysaires, dont la saillie des vis est parfois exubérante. Pour autant, seule une minorité de ces dispositifs seront mal tolérés et nécessiteront leur retrait par le chirurgien. Dans ce cadre, l’échographie nous semble jouer un rôle déterminant. Par une simple pression de la sonde sur une vis saillante, le réveil de douleurs précisément reconnues par le patient permet d’affirmer sa responsabilité dans les symptômes et de prédire le succès d’un éventuel retrait du matériel. En revanche, l’absence de douleur significative poussera à la prudence et incitera à chercher une autre cause à cet inconfort (douleurs irradiées notamment).
Le calibre des pédicules vasculo-nerveux à la racine des membres, mais aussi leur proximité de l’os aux extrémités, les rend vulnérables vis-à-vis du matériel orthopédique. Au membre supérieur, on citera par exemple le risque d’embrochage du pédicule axillaire et de nerfs satellites par les vis d’ostéosynthèse de plaques (23), les vis de verrouillage de clous (24) ou les broches percutanées (25) de l’humérus proximal. Les lésions artérielles seront volontiers aigues, hémorragiques, mais parfois différées. Le cas d’un faux anévrysme sous-clavier se compliquant d’une claudication intermittente du membre supérieur vingt-deux mois après une ostéosynthèse claviculaire est notamment rapporté dans la littérature (26).
Dans le cadre de prothèses de hanche sujettes à une migration pelvienne de la cupule acétabulaire, des cas de compression artério-veineuse iliaque externe et du nerf crural ont été recensées (27).
Comme pour les tendons, les nerfs des avant-bras et de la jambe peuvent être lésés au cours ou à distance du geste opératoire. On citera par exemple les lésions du nerf fibulaire superficiel par une vis de verrouillage oblique de clou tibial (28), une lésion du nerf radial au contact d’une vis humérale ou celle du nerf tibial postérieur par une vis calcanéenne.
Dernière modification de la page le 18 Octobre 2013